L’ambre balte, rencontre avec Harijs

Je rêvais de vous ramener une odeur vieille de 60 millions d’années ! Celle qui se dégage dans l’atelier de Harijs lorsqu’il initie la rencontre abrasive entre un papier de verre et une pépite de résine. Cette dernière, aussi vieille soit-elle, a su garder sa jeune odeur mielleuse, celle que je connais de la résine de pin qui colle à ma peau lorsque je caresse ce conifère.

L’ambre fait rêver les femmes depuis des millénaires. Mais levons toute ambiguïté avant de poursuivre ce voyage. Je viens d’évoquer une odeur, mais je ne fais aucunement référence au parfum d’ambre, qui est une composition faite à partir d’une déjection de cachalot. Je vous présente ici une matière végétale et organique.

L’ambre, que l’on qualifie souvent de pierre ou de minéraux, est en réalité une résine fossile de pin de plusieurs dizaines de millions d’années. Leur seul point commun, avec l’ambre gris utilisé en parfumerie, c’est qu’ils sont tous deux rejetés par la mer et se récoltent sur les plages ou à la surface de l’eau.

Harijs, maître artisan d’ambre depuis 3 générations

Lors de mon passage en Lettonie en mai dernier, j’ai eu le plaisir de passer une journée avec l'un des derniers maitre artisan d’ambre.

Harijs Jakobsons est né dans le monde de cette résine ancestrale. Son grand-père et son père étaient tous deux artisans. Très tôt, Harijs a commencé à voir des formes aux ambres qu’il trouvait dans les tiroirs de la maison et à créer plus tard ses propres bijoux.

Comme tous métiers d’art, l’inspiration a besoin de temps, dit-il. Il lui arrive de sortir un ambre du tiroir, d’observer sa transparence grâce à une petite lampe de poche, d’admirer sa couleur, sa texture et de le travailler quelques semaines plus tard seulement.

Vrai ou faux ? La pierre qui flotte !

Harijs me met rapidement en garde ! Aujourd’hui on trouve beaucoup d’ambres pressés à chaud à partir de poudre d’ambre, mais malheureusement aussi de nombreuses contrefaçons à base de copal et de plastique.

Il s’empresse alors de me montrer comment distinguer un vrai d’un faux.

Premièrement le bain d’eau salée : mettez 130 grammes de sel dans un litre d’eau et l’ambre flottera alors que le plastique, lui, coulera.

Deuxièmement : placez l’ambre sous une lampe ultra violette, il révèlera alors une couleur blanchâtre et laiteuse due à des microfissures. (Certains chercheurs d’ambre utilisent aujourd’hui cette méthode pour le récolter la nuit sur les plages).

Troisièmement : donnez un grand coup de marteau sur l’ambre, il se brisera en mille éclats, le plastique non. Option de dernier recours évidemment et difficilement réalisable en magasin ! Harijs n’a néanmoins pas hésité un instant pour me faire cette démonstration ! C'est peut-être cette dispersion d'éclats d'ambre qui donne tout le charme à son atelier.

L’ambre est brut et sa surface rugueuse. Comme il est tendre, il se laissera facilement polir pour prendre des formes lisses et brillantes.

Des inclusions sont souvent présentes comme par exemple des bulles d’air, des insectes ou des végétaux très anciens, que la résine a gardé prisonniers. Tout cela déterminera la valeur finale de l’ambre.

La palette de couleur est également très large. Alors que l’on ne connaît que sa couleur sirupeuse cognac, l’ambre peut aussi rappeler le rouge de la terre, le blanc doré des nuages au coucher du soleil, ou le vert des jeunes aiguilles, mais celui-ci reste beaucoup plus exceptionnel.

« L’ambre vert est très rare, si tu en vois trop dans un magasin il faut fuir ». Les vitrines des villes lettonnes ruissellent d’ambres de différentes couleurs, et j’ai souvent dû fuir !

Vous découvrirez, sur une des photos, la précieuse collection des 3 générations de Harijs. Cela donne un bel aperçu de cette diversité.

Comment l’ambre se récolte-t-il ?

J’aurais aimé assister à la pêche d’ambre, mais celui-ci ne se récolte le plus souvent qu’en automne. Il est si léger qu’il faut des courants marins assez violents, notamment en période de tempête, pour le ramener sur le sable. On le déloge ensuite au milieu des algues qu’il faut patiemment démêler. "Malheureusement, les très grosses ambres sont devenus rares à cause de la pêche et des gros chalutiers", précise Harijs.

Pendant ce séjour en Lettonie, Sam et moi avons également rencontré Ilze Vainovska, chercheuse d’ambre à Liepaja. Elle le travaille de manière plus brute et les orne de magnifiques nœuds symboliques en cordelette fine.
« Toute personne ici possède une ambre en guise d’amulette » nous dit Ilze. Harijs me confirme que les couples viennent dans l’atelier le jour de leur mariage pour polir un ambre et en faire leur propre amulette.

Ilze avait été mise à l’honneur lors du passage de l’équipe Échappées Belles à Riga, que vous pouvez découvrir ici (minute 00:43).
https://www.youtube.com/watch?v=vWPaB9ltHlM

 

La route de l’ambre

Les pays baltes et la Russie se disputent le lieu de naissance de la route de l’ambre, mais on sait aujourd'hui qu’il a fait son chemin jusque dans les tombeaux des pharaons qui le considéraient comme une œuvre divine, puisqu’il fige la vie. Ils l'appelaient également les larmes des Dieux.

Mais encore ?

L’ambre a toujours été utilisé à des fins thérapeutiques. On le retrouve en médecine chinoise par exemple, grâce à son caractère électrostatique il aura un effet apaisant sur la zone douloureuse. L'acide succinique qu'il contient aura des vertus purificatrices et calmante, il renforce le système immunitaire, dégage les voies respiratoires et illumine l’esprit !

Un dicton pour finir ...

“Si tu as une ambre dans ton porte-monnaie tu seras en bonne santé, tu auras de l’argent et un peu d’amour” !

Pourquoi un peu ? Je n’ai pas eu réponse à cette question, mais en tout cas, voilà qui est fait, mon ambre est dorénavant dans mon porte-monnaie !

Une dernière anecdote :

En arrivant en Lettonie, je n’avais aucune idée de la manière dont on récoltait l’ambre. Pleine d’enthousiasme, je suis alors partie, bâton à la main, à la chasse à l’ambre baltique en vaguant des heures au bord de mer. J’ai découvert de merveilleux cailloux polychromes qui me faisaient espérer. Bredouille, j’en ai très vite conclu que « Chercher est tout aussi beau que trouver ». Ces promenades rythmées par les vents marins avaient autant de vertus que l’ambre elle-même.

Merci pour votre visite et à très bientôt,

Céline

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Nicole Graine- Riéra

Très beau reportage Céline. J’ai découvert l’univers de l’ambre, si mystérieuse et fabuleuse, en Pologne et plus précisément à Gdansk il y a quelques années. C’est une matière fascinante. Ça donne effectivement envie d’aller en la Lettonie arpenter les plages ! J’ai un faible pour l’ambre rouge.

Céline

Bonjour Nicole et merci pour votre passage. La Pologne se trouve certainement encore sur la route de l’ambre, ou en tout cas a subit une belle influence des pays plus au nord.
A bientôt,
Céline

Mey

Un très beau reportage et toujours de belles photos pour le documenter et tu m’as donné l’envie d’aller faire un petit tour du côté de la Lettonie.

Céline

Merci Christine 🙂 … Un pays avec de nombreuses traditions et très gourmet aussi 😉.

catherine pontailler

Merci de ce reportage aux couleurs si chatoyeuses. Et si bien documenté.
Je m’en vais regarder mes quelques ambres de plus près, il y en a surement une authentique, mais des doutes sérieux sur une autre (cela avait toujours été mon pressentiment). Tenter l’effet apaisant sur une zone douloureuse me séduit, je vais essayer.

Céline

Merci beaucoup Catherine. Quand on met le nez dans le monde de l’ambre, on en tombe vite amoureuse. A bientôt, Céline

Sylvie

Très beau reportage Céline. Les tons sont en accord avec l’ambre chaude avec une pointe de mystère je suis sous le charme de cette ambiance

Céline

Un grand merci Sylvie, effectivement, les tonalités de la série sont très en accord avec l’ambre …
Son atelier était vraiment extraordinaire, j’ai adoré passer cette journée avec Harijs, quelle authenticité. A bientôt,

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